Sarkozy avait au moins une bonne raison pour refuser le débat avec Bayrou.
Dès hier, la presse (les media, de façon
générale) reprenait le terme "débat" en le hissant au niveau d'un véritable débat présidentiel alors qu'il ne s'agit, en fait, que d'une tribune libre. Beaucoup de gens hélas ! ne vont
pas plus loin que la manchette et s'il y a en France quelqu'un qui connaît le poids de la communication, c'est bien Sarko. C'est d'ailleurs à la fois son point fort et son point faible.
Nous sommes dans une époque qui avive toutes les tensions. Or, alors
qu'on a refusé aux électeurs de Le Pen en 2002 (qu'ils fussent
authentiques lepénistes ou qu'ils eussent voté pour lui par lassitude,
dégoût ou colère) un débat qui leur était dû, on ne verrait aucun
inconvénient à présenter cette tribune libre entre Ségo et Bayrou comme
un débat d'importance égale à celui dont ils ont été frustrés il y a
cinq ans. C'est donc les rejeter, une fois de plus, dans une
marginalisation qui peut mener loin. (Inutile de dire que
c'est Chirac qui a refusé et lui seul : s'il avait accepté, d'abord, il
n'était pas sûr de conserver la partie belle et ensuite, ses 82%, à mon
avis, se faisaient plus problématiques.)
Sarko, lui, a ratissé
au plus large, parmi ceux qui, justement, avaient voté Le Pen sans
conviction mais par ce qu'ils en avaient assez. S'il accepte un débat
avec Bayrou, il fait un bras d'honneur à ces électeurs-là dont il a encore besoin alors qu'il n'est absolument pas sûr des électeurs de Bayrou.
En
adoptant l'attitude qui est la sienne actuellement, outre qu'elle est
conforme à son personnage, il est pratiquement sûr de conserver ces
électeurs-là - voire d'en gagner.
Voilà mon analyse - qui est peut-être fausse, je l'admets.